Dans une économie mondialisée où nous avons accès à une multitude de produits fabriqués à rabais à l’étranger, le réflexe d’une personne normale sera de trouver la meilleure aubaine ou, au mieux, le plus grand rapport qualité/prix… Cependant, la valeur des produits doit être calculée bien au-delà du prix. La crise actuelle nous rappelle donc l’importance de regarder l’étiquette… de prendre conscience de la provenance de nos aliments.
Acheter ici, c’est maintenir en vie l’entreprise locale, qui fera elle-même des affaires avec une autre entreprise d’ici. Au contraire, si le produit est fabriqué en Chine ou ailleurs, ce sont eux qui feront circuler l’argent dans leur économie et qui pourront la dépenser. Ça fait toute la différence entre un village vivant et une municipalité en dévitalisation; entre des campagnes habitées et vivantes et des terres inoccupées vendues à des intérêts étrangers qui spéculent sur la valeur du sol.
Acheter local, c’est aussi s’assurer de protéger l’environnement. À l’heure où le défi à relever semble si grand, chaque petit geste compte. Le dollar de plus dépensé pour votre confiture fabriquée par un producteur du village voisin, vient de sauver les émissions de gaz à effet de serre nécessaires au transport du pot de confiture fabriqué ailleurs. Ça vaut probablement beaucoup plus qu’un dollar. C’est comme ça qu’il faut voir les choses. C’est ce qu’on appelle les circuits courts. Après analyse, acheter local, chez le producteur, c’est moins cher qu’il ne le semble parce que nous payerons inévitablement cette différence quelque part (en chômage, en subventions, en programmes environnementaux, etc.). Puis à l’usage, vous risquez d’être agréablement surpris, car les produits locaux vous offriront souvent un prix compétitif.
En temps de crise, l’achat local prend tout son sens. On s’assure d’offrir un revenu à un voisin qui sera en mesure de nous nourrir. C’est un pensez-y bien. Le libre marché oui, les économies d’échelles oui, mais la sécurité alimentaire ça vaut aussi quelque chose.
Cependant, cette crise nous fait également prendre conscience du fait que la production agricole québécoise dépend massivement de la main-d’œuvre étrangère. Ces travailleurs mexicains, guatémaltèques ou d’ailleurs, viennent faire ici le travail que nous ne voulons pas faire parce que trop exigeant et trop peu payant. Nous devons alors, dans le contexte de la fermeture des frontières, être inventifs et trouver des moyens de les amener et remplacer ceux qui ne pourront pas venir. L’État se doit d’être partie prenante de ce processus et veiller à une amélioration des conditions. Notre sécurité alimentaire en dépend.
Il est d’autant plus important d’encourager nos producteurs qui doivent faire plusieurs concessions pour arriver à produire. En finançant ainsi nos entreprises locales, une fois la crise passée, nous serons davantage en mesure de se relever. Il faut mettre toutes les chances de notre côté, et même espérer que cela devienne le réflexe premier d’acheter chez nous. Car en effet, même après la crise, nos différents partenaires ne s’en sortiront pas tous en même temps, et il risque d’y avoir des problèmes d’approvisionnement pour encore un bon moment. Les co- présidents de l’Institut Jean-Garon arrivent aux mêmes conclusions : « La pire erreur serait le retour au business as usual, car il y aura d’autres perturbations des sources d’approvisionnement extérieures […]. La sécurité alimentaire de la population est trop importante pour prendre ce genre de risque ».
Au cours des derniers jours, plusieurs paliers de notre système alimentaire ont été identifiés comme étant fragilisés. À la suite d’une brusque augmentation de la demande, le prix de certaines denrées comme le bœuf, le porc et le poulet ont augmenté. Ce qui est rassurant, c’est que plusieurs de ces denrées sont fabriquées ici. Notre capacité de production locale, quoi que très performante, n’est pas à son maximum. Nous pourrons toujours nous ajuster, à partir du moment où nous avons une production locale forte.
L’achat local soude également les communautés : les campagnes sont habitées par les producteurs et leur famille, pleines de vie et d’espoir. Un territoire vivant qui donne le goût aux jeunes de créer leur entreprise chez-eux en mettant en valeur cette facette de richesse naturelle qui était jusque-là peu valorisée. Acheter local c’est investir en nous-mêmes. Merci d’y penser, maintenant mais aussi plus tard.
Le journal « La Terre de chez-nous » nous présentait récemment le défi Agrilocal, lancé par Julie Bissonnette, présidente de la Fédération de la Relève Agricole du Québec. Ce défi nous invite à poser avec un produit local sur les réseaux sociaux. Alors je pose aujourd’hui avec un de mes produits favoris, le miel baratté du Rucher Mellifera de Saint-Norbert. Je vous invite tous à relever ce joyeux défi.
Poursuivons le mouvement et achetons local!
Yves Perron
Député du Bloc Québécois
Berthier-Maskinongé