Le Mouvement d’éducation populaire de Lanaudière (MEPAL) appel à l’action et donne-rendez-vous à toute la population le 17 avril prochain au terminus de Joliette pour 12h45.
Les défis en matière de transport sont nombreux et pèsent particulièrement lourd sur les personnes à faibles revenus, les personnes âgées, les femmes et les familles. En pleine crise climatique, le transport collectif apparaît comme une solution qui permettrait à la fois de réduire les inégalités et de réduire les émissions de gaz à effet de serre. Pourtant, partout sur le territoire, l’offre de services de transport collectif est insuffisante, inégale, et en détérioration. Un regroupement d’organismes de la région souhaite faire entendre ses revendications sur le sujet et presse le gouvernement du Québec d’en faire plus pour assurer une transition juste et viable.
L’enjeu du transport est un des dossiers les plus importants du regroupement depuis quelques années. Plusieurs témoignages recueillis par les organismes affirment que leurs membres peinent à trouver du travail, quittent l’école, ne peuvent pas se rendre à la banque alimentaire, doivent annuler leurs rendez-vous de santé ou manquent à des engagements judiciaires faute de moyens de transport. Ces situations ne sont pas sans conséquence. Les difficultés qui s’ajoutent décuplent les demandes d’aide aux organismes communautaires. « Le service de taxi-bus par exemple n’est pas adapté pour les familles qui ont de jeunes enfants avec leurs sièges d’auto, l’horaire ne répond pas nécessairement aux besoins, les coûts sont un enjeu et le processus de réservation peut prendre plusieurs semaines pour une famille nombreuse ! » Nancy Sarrazin, intervenante à Cible famille Brandon. Selon le MÉPAL, le transport collectif devrait être reconnu comme un droit fondamental puisqu’il est un pilier essentiel pour l’exercice de plusieurs autres droits, tel que la santé, l’éducation, le revenu décent et la participation citoyenne. « Il est faux de croire que tout le monde peut se permettre le fardeau financier d’une voiture.» Mentionne Jessica Lambert, co-coordonnatrice du MÉPAL.
Plusieurs instances reconnues dans le milieu ont déjà démontré comment le manque d’accès au transport nuit à l’amélioration des conditions de vie. Par exemple, l’étude publiée en 2014, par la Table de concertation des groupes de femmes de Lanaudière (TCGFL) soutenaient que le manque de transport réduit les opportunités pour briser l’isolement des femmes en situation de pauvreté. Les possibilités d’améliorer leur situation à moyen et long terme sont directement reliées avec leurs possibilités d’accès au transport. De récentes fiches d’information produite par l’Institut de Recherche et d’Information socio-économique (IRIS) soutiennent également l’idée que le système de transport axé uniquement sur l’automobile individuelle constitue un modèle de développement favorisant les inégalités économiques. On rajoute que c’est aussi l’aménagement du territoire qui devrait être revu pour favoriser l’accès à des services de proximité. «J’aimerais que mes enfants puissent faire des activités après l’école, je dois répondre seule à mes besoins et ce n’est pas toujours possible.» Cynthia, mère de quatre enfants, membre de Cible famille Brandon.
Récemment, Trajectoire Québec a mis en lumière les différents obstacles à la mobilité rencontrés par la population de Lanaudière dans un portrait diagnostique percutant. Les services sont difficilement accessibles sur une importante partie du territoire, voire inexistants, la connexion entre les MRC est rarement possible, la fréquence et les horaires sont inadaptés et la tarification est trop élevée pour bien des personnes. Ces obstacles se traduisent par des conséquences directes sur la vie quotidienne des habitants. «Je dois reporter des rendez-vous importants à cause des délais d’attente.» Mentionne, Kim duMouvement personnes d’abord de Joliette. La situation n’est guère meilleure à l’échelle provinciale, où l’offre de transport collectif est insuffisante et inégale et tant à diminuer.
Dans ce portrait de Trajectoire Québec, plusieurs MRC mentionnent que le principal enjeu de développement du transport collectif est de nature financière. Le financement provenant du Ministère des transports et de la mobilité durable ne suffit pas pour répondre aux besoins de la région et les charges financières qui incombent aux municipalités et aux MRC sont trop importantes. Selon Jessica Lambert du MEPAL, le désengagement de l’État, depuis la réforme Ryan de 1992, pose problème, laissant aux municipalités la responsabilité du financement et de la gestion des transports collectifs, et ce, dans bien des cas, avec très peu de moyens financiers.
De plus, les membres du MÉPAL considèrent qu’il est tout à fait absurde, en pleine crise climatique, que les gouvernements continuent d’investir massivement dans les infrastructures routières au détriment des services de transport collectif qui sont à l’agonie partout au Québec. Il est d’ailleurs soutenu par l’IRIS que la stratégie actuelle du gouvernement pour la transition énergétique va à l’encontre des principes adoptés dans son Plan pour une économie verte. En mettant l’accent sur l’électrification des transports et en forçant encore une fois le recours à l’automobile individuelle, les inégalités économiques restent dans l’ombre de la transition, tout autant que les enjeux environnementaux générés par l’industrie de la voiture électrique.
« Les choix budgétaires de la CAQ démontrent une profonde indifférence face à la souffrance des gens et favorisent de façon complètement décomplexée les plus riches, c’est honteux », mentionne Cynthia Dubé Viau travailleuse au MEPAL.«Il est grand temps que les gouvernements réorientent leurs priorités en termes d’aménagement du territoire, et repensent l’entièreté du système de transport, pour réduire la dépendance à l’automobile et favoriser l’utilisation des transports collectifs. Cela nécessite un changement radical dans la manière dont les fonds publics sont distribués.»
Face à cette réalité, le MÉPAL revendique entre autres «un investissement massif et une prise en charge par le gouvernement provincial du financement du transport collectif comme un service public. Que les différentes instances qui assurent le déploiement des services soient accompagnées équitablement en fonction des besoins et des réalités territoriales pour pouvoir assurer un service continu, couvrant tout le territoire, avec une fréquence suffisante et un arrimage fluide. Pour que le transport collectif soit une option privilégiée par les utilisateurs, il est nécessaire que l’offre soit interconnectée et efficace, que les coûts soient avantageux, au minimum fixé selon une tarification sociale. Les services doivent être adaptés à la diversité des capacités et des besoins des utilisateurs.trices, incluant ceux des personnes à mobilité réduite, des personnes en situation de pauvreté des femmes et des familles.»
Le MÉPAL invite les différentes instances et la population à se rendre sur son site internet pour prendre connaissance de l’ensemble de ses revendications ainsi qu’à participer à l’action prévue le 17 avril prochain. «Lutter pour l’accès aux transports collectifs, c’est lutter pour la justice sociale et contre la crise climatique !» Jessica Lambert, co-coordonnatrice du MÉPAL. Pour plus d’informations ou pour soutenir le mouvement, veuillez contacter l’équipe du MÉPAL à cette adresse : mob@mepal.net.