L’Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des service sociaux (APTS) critique sévèrement la décision de démanteler l’équipe de professionnels en place dans les ressources intermédiaires (RI) du territoire du Centre intégré de santé et de services sociaux (CISSS) de Lanaudière. Depuis plus d’une décennie, les résidents de onze de ces centres d’hébergement pour personnes âgées ou en perte d’autonomie du secteur sud de Lanaudière bénéficient des services d’ergothérapie, de nutrition, de physiothérapie et d’éducation spécialisée offerts par des professionnels prêtés par le CISSS pour répondre à leurs besoins. Et voilà qu’à compter du 1er avril prochain, les heures de services professionnels seront abolies. Pour avoir accès à une ressource professionnelle spécialisée, les personnes hébergées devront dorénavant être inscrites individuellement sur les listes d’attente des équipes de soutien à domicile des CLSC. Comme aucune autre mesure n’est prévue pour les prioriser parmi la clientèle du Soutien à domicile, elles pourraient patienter plus d’un an. C’est ce que la direction appelle un « service à la carte ».
Depuis la fusion en 2015 de tous les établissements de Lanaudière en une seule entité administrative, la nouvelle direction cherche à uniformiser l’offre de services. Comme les résidences du nord de Lanaudière n’ont pas développé certains programmes de maintien de l’autonomie par exemple, au lieu de leur permettre d’en profiter maintenant qu’elles relèvent du même CISSS, on les élimine dans le sud. « On nivelle vers le bas, se désole Richard Belhumeur, responsable de l’APTS dans Lanaudière, au détriment de la clientèle dont la condition risque fort de se détériorer sans ces services adaptés. »
Les membres de l’APTS qui travaillaient au quotidien auprès de ces résidents déplorent le démantèlement de leur équipe multidisciplinaire. Les représentants de la direction incitent le personnel de l’équipe dédiée (infirmier, social) à référer seulement en cas d’urgent besoin aux professionnels en ergothérapie, physiothérapie et nutrition et les problèmes de comportement des résidents seront gérés par le personnel infirmier, réglés souvent par la médication. « Nous voyons dans ces décisions un changement d’orientation néfaste pour les personnes hébergées, explique le porte-parole de l’APTS. On abandonne l’approche axée sur la création d’un milieu de vie développée au cours des 11 dernières années pour revenir à une approche essentiellement médicale. C’est un recul contre-productif. »
On observe du côté infirmier la même propension à économiser en remplaçant les infirmières diplômées par des infirmières auxiliaires. En réaction au départ prochain des ressources professionnelles, un médecin qui offrait des consultations dans trois résidences a annoncé qu’il quittera en septembre. Les professionnels anticipent une augmentation de fréquence de visites des résidents à l’urgence.
Afin de sensibiliser les membres de la direction à l’impact de la déprofessionnalisation des services aux personnes hébergées en RI, un groupe composé de nutritionnistes, ergothérapeutes, physiothérapeutes, éducatrices spécialisées a signé une lettre expliquant de façon détaillée la réalité des résidents et demandant comment le CISSS entend, sans leurs services, répondre aux besoins ce cette clientèle vulnérable. Les RI accueillent en effet des cas beaucoup plus lourds que dans le passé dont les capacités d’autonomie sont de plus en plus limitées.
Les professionnels craignent un manquement déontologique à savoir que l’équipe dédiée soit incitée à référer au minimum aux services professionnels du CISSSSL. Cet aspect n’est pas favorable au respect du code des professions et de leurs actes réservés. Ceci rendrait le personnel de l’équipe dédiée vulnérable à dépasser ses compétences.
Rappelons qu’en janvier dernier, le Protecteur du citoyen a rendu public un rapport d’intervention dans les établissements de la Gaspésie en recommandant notamment à la direction du CISSS de cette région d’« améliorer la qualité du milieu de vie offert aux résidents des milieux d’hébergement placés sous sa responsabilité ». L’APTS espère qu’une intervention du Protecteur du citoyen ne sera pas nécessaire pour rappeler l’importance de cet objectif au CISSS de Lanaudière.